Les informations données dans ce chapitre ne sont pas
à considérer comme des conseils ou des recommandations. C'est seulement
le médecin traitant qui peut juger du traitement adapté à chaque cas.
Dans la plupart du temps la pelade régresse spontanément après un temps
relativement court (dans 50% une repousse est observée dans la première
année) mais une rémission spontanée peut également apparaître après
plusieurs années de pelade même universelle (voire évolution
de la pelade). En effet, le follicule pileux
n'est pas détruit mais seulement bloqué dans une phase de son développement.
Actuellement il n'existe pas de cure pour la pelade. Il existe cependant
un certain nombre de traitements dont l'efficacité varie selon l'individu,
la gravité de la pelade et sa durée. Il est d'autant plus difficile
d'évaluer l'efficacité des traitements que l'évolution
de la pelade est extrêmement variable. En général les traitements sont
plus efficaces dans les formes les moins graves et lorsque la pelade
est récente. Plus encore que dans d'autres maladies, le morale peut
influer l'évolution de la repousse. Il est difficile de donner des pourcentages
de réussite des traitements car les critères d'évaluation varient selon
les études. Les facteurs d'un mauvais pronostic semble être un jeune
âge au début de la maladie et la présence d'atopie (prédisposition héréditaire
à développer des réactions allergiques) en ce qui concerne l'évolution
générale de la maladie. Pour la poussé, une surface
atteinte étendue, des pelades ophiasiques,
décalvantes, universelles ou diffuses, l'ancienneté,
la chute à distance des plaques et certaines altérations
des ongles sont des signes péjoratifs (Assouly 1999). La maladie
évolue selon son propre rythme et les traitements ne peuvent souvent
qu'aider à accélérer le processus mais n'ont pas d'effet sur l'évolution
générale. Si la maladie n'est pas finie, les cheveux pourront retomber
à l'arrêt du traitement qui peut parfois être repris. Les patients ne
répondent pas tous au même traitement. Il ne faut donc pas se décourager
et persévérer sans pour autant s'obstiner à trouver un traitement qui,
dans certains cas, n'existe pas ou pas encore. Certaines personnes peuvent
également vanter des produits miracles pour abuser du désarroi des malades.
Des traitements immunosuppresseur
non spécifiques (Corticoïdes)
Ce sont des traitements fréquemment utilisées dans le traitement
des pelades. Les traitements aux corticoïdes sont les plus fréquents.
Ils peuvent être administrés sous différentes formes. Le traitement
topique par des crèmes est le moins lourd mais n'a qu'une efficacité
très modérée notamment pour des pelades extensives. Ce traitement
provoque parfois de l'acné sur les zones d'application. L'injection
de corticoïdes au niveaux des plaques peladiques donne souvent des
résultats assez probants. Cependant ce traitement est souvent mal
supporté par les patients et un effet secondaire peut être une atrophie
de la peau. Ce traitement peut être utilisé pour des plaques isolées
ou pour les sourcils mais n'est pas adapté aux pelades
décalvantes ou universelles. Ce traitement est généralement indiqué
quand moins de 50% du cuir chevelu est atteint. Chez ces dernières
une corticothérapie systémique est souvent indiquée. Celle-ci peut
être administré par voie orale. Cependant la prise quotidienne de
comprimé de corticoïdes à des doses importantes peut avoir des multiples
effets secondaires (hypertension, obésité, acné, problèmes psychologiques,
cataracte, ostéoporose, diabète) et elle nécessite un régime sans
sel dû à une rétention d'eau. De plus une rechute de cheveux est souvent
observée à l'arrêt du traitement. D'autres traitements d'effet plus
long comme la PUVA thérapie peuvent alors êtres indiqués. Dans certains
cas bien précis (pelade récente extensive à évolution rapide sans
antécédent) une corticothérapie par bolus peut être indiquée. Celle-ci
nécessite une série de 3 à 6 hospitalisations de trois jours chacune
à intervalle d'un mois. Malgré ce protocole assez contraignant les
bolus sont généralement bien tolérées. Il faut cependant noter qu'une
rechute après l'arrêt du traitement est fréquemment observée.
Mécanisme d'action : Leur action reste globale et pourrait
être due à la diminution de la sécrétion de molécules inflammatoires
(Interleukines IL1, IL2), la suppression de lymphocytes cytotoxiques
et l'augmentation de lymphocytes T suppresseurs. On peut constater
une diminution du nombre de cellules de Langerhans et de leur activation
lymphocytaire (Fiedler 1992).
Immunosuppresseurs
spécifiques (ciclosporine A)
La ciclosporine A a également été utilisée comme traitement des pelades.
C'est un puissant immunosuppresseur souvent utilisé pour prévenir
les rejets de greffes. Cependant ce médicament présente de nombreux
effets secondaires sérieux (notamment une néphrotoxicité). Des études
sur l'utilisation locale de la ciclosporine A sont en cours mais semble
donner des résultats peu probants. Des nouvelles substances agissant
comme la cyclosporine A peuvent être utilisées localement mais elles
sont actuellement en développement (voir traitements
futurs). Curieusement des traitement par la ciclosporine A semblent
également capable d'induire une pelade.
Mécanisme d'action : Il agit en inhibant l'activation et la
prolifération des lymphocytes T en bloquant la transduction du signal
médié par les récepteurs des cellules T. Il diminue également sélectivement
les lymphocytes T CD4+ et leur synthèse de lymphokines. Lors de la
pelade il semble rapidement pouvoir inverser le rapport CD4+/CD8+.
La PUVA thérapie
C'est un traitement à l'ultraviolet A en association avec des médicaments
(psoralène) qui augmentent l'effet. Ce traitement est relativement
lourd car il nécessite trois expositions par semaine. Un arrêt de
la chute et une repousse sont observés dans 30% des cas mais une rechute
à l'arrêt du traitement est très souvent constatée. La supériorité
d'une irradiation corporelle totale est controversée.
Mécanisme d'action : Ce traitement agit sur la fonction des
lymphocytes T et la présentation antigènique et conduirait à une déplétion
de cellules présentatrices d'antigènes (les cellules de Langerhans).
L'immunothérapie locale
par une sensibilisation de contact
C'est après les corticoïdes le traitement le plus utilisé avec une
bonne efficacité notamment dans les cas sévères de la maladie mais
elle est utilisée exclusivement chez l'adulte. Ce traitement peut
également être appliqué aux sourcils mais avec une concentration plus
faible. Ce traitement consiste à provoquer un eczéma de contact en
utilisant des allergènes puissants. Le système immunitaire reconnaît
ces molécules comme étrangée ce qui conduit au développement d'une
réponse inflammatoire qui provoque une dermatite. Le patient est sensibilisé
par application d'un allergène de contact puis l'eczéma est maintenu
par une application hebdomadaire de cet allergène à une dose plus
faible. Ce traitement est surtout utilisé dans les pertes de cheveux
extensives. Sur des pelades décalvantes ce traitement permet une repousse
complète dans 30 % des cas et incomplète dans 30% des cas. La repousse
n'est notamment pas satisfaisante chez les patients avec des antécédents
familiaux d'atopie et les malades qui ne développent pas de dermite.
La repousse des cheveux est habituellement observée après environ
8 à 16 semaines mais des rechutes sont observées à l'arrêt du traitement
dans 40% des cas (MacDonald 1999) dans de tel cas le traitement peut
être repris. L'allergène de contact le plus utilisé actuellement pour
cette immunothérapie topique est le diphénylcyclopropénone (diphencyprone,
DCP) ou l'acide squarique dibutylester (SADBE). Le dinitrochlorobenzène
(DNCB) fut temporairement abandonné pour ses effets mutagènes, probablement
liés à des contaminants de la préparation. Ce traitement n'est généralement
pas utiliser chez la femme enceinte et les enfants. Comme ce traitement
est basé sur l'induction d'un eczéma léger, le patient peut se plaindre
de démangeaison, d'érythème et de desquamation. De plus les concentrations
d'allergènes nécessaire pour induire un eczéma varient d'un patient
à l'autre et doivent donc d'abord être déterminées. Il faut éviter
le contact avec les surfaces traitées pendant les 24 heures suivant
le traitement. Parfois une dépigmentation ou au contraire une hyperpigmentation
de la peau peut être constater notamment chez des personnes à la peau
sombre.
Mécanisme d'action : La repousse des cheveux pourrait être
due à une activation d'une autre sous-population de lymphocytes T
que celle observée dans l'infiltrat lymphocytaire des plaques peladiques.
En effet, lors de l'allergie de contact induite par le traitement
on constate une accumulation de lymphocytes T dites suppresseurs (CD8+)
qui pourraient inhiber la réaction auto-immune par un mécanisme non
spécifique de compétition antigènique. On constate effectivement une
diminution du rapport CD4+/CD8+ avec ce traitement et un départ des
lymphocytes de la zone périfolliculaire (Baadsgaard et coll.1987).
Les allergènes de contact pourraient également intervenir en modifiant
le profile des cytokines proinflammatoires au niveau du follicule
pileux (Hoffmann et coll.1994) et ce traitement induit une expression
des antigènes HLA-DR sur les kératinocytes épidermiques et diminue
l'expression anormale des antigènes HLA-ABC et DR dans l'épithélium
de la partie inférieur des follicules (Bröcker et coll.1987).
Irritants non-spécifiques
(phénol, benzoate de benzyle, dithranol, anthraline)
L'anthraline 0,5% donne des résultats satisfaisant dans
20 à 67% des cas selon les études (Schmoekel et coll.1979, Fiedler Weiss
et coll.1987) et est indiqué dans le traitement des
enfants (Mandini et coll.2000). Les effets sécondaires (hyperpigmentation,
irritation locale, adénopathies satellites) sont modérés.
Mécanisme d'action : . Ils agissent en perturbant
la croissance et la différenciation des cellules de la peau. Ceci stimule
le système immunitaire. En effet quelques travaux ont montré une production
accrue ou une inhibition de certaines cytokines. Ainsi le dithranol
inhiberait la synthèse d'IL2 via la production de radicaux libres (Anderson
1989). De plus il semble avoir une toxicité vis à vis des cellules de
Langerhans. Ces irritants peuvent également donner une dermatite inflammatoire
mais elle n'est pas nécessaire.
Le Minoxidil
Ce médicament qui est appliqué localement est couramment utilisé
lors de l'alopécie androgènique. Cependant son efficacité lors des
pelades reste très controversé notamment dans les cas sévères. L'efficacité
de ce traitement peut être améliorée en le combinant avec un traitement
à l'anthraline ou au betaméthasone. La pénétration
du minoxidil peut être augmenté en cotraitant avec la vitamine A acide.
Une efficacité dans 8 (FiedlerWeiss et coll.1987) à 45 % (Price 1987)
a été observée. Des effets secondaires peuvent être des vertiges et
des maux de tête ainsi qu'une hyperpilosité. Dans 10% des cas on constate
des réactions locales (démangeaisons, érythème ou irritations transitoires).
Mécanisme d'action : Le minoxidil stimule la prolifération
et la différenciation des kératinocytes et régule la physiologie du
cheveu. On constate une diminution de l'infiltrat de lymphocytes T
et une diminution de la capacité des mitogènes à activer des lymphocytes
(Fiedler et coll.1988). C'est un puissant vasodilatateur utilisé contre
l'hypertension. Cependant son action contre la chute des cheveux serait
plutôt due à l'inhibition des canaux potassiques conduisant à l'hyperpolarisation
de la cellule aboutissant à une modification des flux calciques. Ceci
pourrait influer les cellules immunitaires puisque le calcium est
important pour la synthèse de l'IL2 par des lymphocytes T activés.
Cependant d'autres inhibiteurs de canaux potassiques n'ont pas d'effet
sur la pelade. Une autre hypothèse de son mode d'action est qu'il
active la synthèse des prostaglandines via l'activation de la cyclooxygènase.
Le minoxidil a également une action sur le VEGF (vascular endothelial
growth factor)
Traitements chez
l'enfant
Beaucoups des médicaments utilisés lors des pelades ne sont pas administrés
chez l'enfant en raison de leurs effets secondaires. L'utilisation
du minoxidil en combinaison avec l'anthraline ou des corticoïdes
locaux a été recommandé (Madani et coll 2000). Un traitement par la
biotine en combinaison avec le zinc pourrait également constituer
une thérapie chez l'enfant (Camacho et coll.1999). Dans certains cas
bien précis des bolus de corticoïdes sont indiqués.